Le 8 septembre, année sainte de la Miséricorde, en la fête de la Nativité de Notre Dame, Sœur Marie Flavie a émis sa première Profession, entourée de ses aînées jubilaires de Platine (70 ans de profession religieuse), de Diamant (60 ans) et d’Or (50 ans) qui, dans l’action de grâce pour la fidélité de Dieu, lui ouvrent le chemin.
Première profession de Sœur Marie Flavie
et jubilés de Platine, de Diamant et d’or
Quelle joie que de faire une première profession religieuse, une profession temporaire comme sœur Marie Flavie ! Quelle joie que de rendre grâce au Seigneur pour 50, 60, 70 années de consécration religieuse, de fidélité du Seigneur, source de votre fidélité ! Le jour où nous célébrons la Nativité de la Sainte Vierge Marie, neuf mois après sa conception immaculée dans le sein de sa maman, Anne, Marie a été manifestée au monde au jour de sa nativité comme le commencement du Seigneur. Et vous avez entendu les paroles que l’Église a choisies pour célébrer cette fête qui nous tourne vers la maternité miraculeuse et divine de Marie. Elle qui en sa virginité a conçue par l’action de l’Esprit Saint, Celui que de toute éternité le Seigneur a choisi d’envoyer pour nous sauver ; de toute éternité, Marie a été choisie pour être la Mère de ce Fils, tant il est vrai que c’est la maternité divine de Marie qui est la cause, le motif de tous les privilèges, à commencer par la conception immaculé alors qu’elle était préservé dès sa conception du péché originel, en passant par la virginité perpétuelle, elle qui demeurait intacte dans son corps et dans sa virginité ante partum et post partum dit la tradition, avant et après l’enfantement, et jusqu’à son assomption, son élévation dans la gloire de son Fils ressuscité, en son âme et en son corps, délibérément de son pèlerinage sur la terre. Mais comme vous venez de l’entendre dans l’évangile, c’est par la perplexité de Joseph que nous entrons dans le mystère de Marie à travers le mystère de sa nativité, car c’est là qu’a commencé à se manifester le mystère de la Vierge Marie, j’ai bien dit la perplexité de Joseph, non pas le doute – Joseph n’a pas douté un instant de l’intégrité et du cœur très pur de celle qui lui a été donné pour épouse, lui qui est le gardien consentant de sa virginité, cette virginité, ce vœu dont elle a déclaré la réalité au jour de l’annonciation. En posant cette question à l’ange sans mettre en doute des paroles par lesquels l’ange du Seigneur lui annonçait qu’elle serait la mère du sauveur et en s’interrogeant sur le comment, – « comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d’homme ? » – c’est-à-dire puisque j’ai décidé de demeurer vierge. Voilà que Joseph retrouvant sa très pure épouse après six mois d’absence où il est allé se mettre au service de sa vieille cousine Élisabeth, découvre, perplexe, cette maternité mystérieuse. Il n’a pas douté de son intégrité, lui qui sait mieux que personne combien Marie est pure, est très pure. La preuve, c’est que lui est un homme juste qui accomplit toujours scrupuleusement, intérieurement et extérieurement la loi sage de Dieu ; il aurait pu la répudier publiquement s’il avait été convaincu de l’adultère de Marie. Et dans cet atermoiement, il allait la renvoyer secrètement, c’est dire qu’il s’arrête devant ce qu’il devine comme un mystère, le mystère de Dieu lui-même qui enveloppe cette maternité de sa très sainte épouse, il ne s’en sent pas digne. C’est pourquoi il voulait la renvoyer secrètement, mais c’est alors qu’un ange lui apparut en songe et lui dit « ne crains pas Joseph, fils de David de prendre chez toi Marie ton épouse car ce qui a été engendré en elle ne vient pas de l’homme » comme nous l’avons entendu dans cette longue généalogie qui est comme une profession de foi de saint Matthieu au seuil de son évangile : un homme qui engendre un homme qui engendre un homme qui engendre Jacob qui engendre Joseph, l’époux de Marie de laquelle fut engendré Jésus qu’on appelle Christ. Le passif divin : ce qui a été engendré en elle vient de l’Esprit saint, elle enfantera un fils et qui lui donnera, toi qui assumeras la paternité de Dieu lui-même pour son Fils sur la terre, le nom de Jésus qui signifie le Seigneur sauve parce que c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. Jésus, ce nom qui résonne profondément dans votre âme de consacrées ; Jésus à qui, en bonnes filles de saint Benoît, vous ne pouvez absolument rien préférer. Jésus, c’est son visage que vous cherchez, c’est Lui qui est le motif de votre engagement, sœur Marie Flavie aujourd’hui.
Chères frères et sœurs, il ne serait pas étonnant que dans une vie consacrée de 50, 60 et 70 ans de fidélité, il y ait eu des moments de perplexité, des moments d’interrogation, peut-être même des moments de doute. Il ne serait pas étonnant qu’au jour d’une première profession religieuse ou d’une profession perpétuelle, il puisse y avoir dans le cœur d’une âme qui veut se consacrer toute entière à Dieu, quelque perplexité, quelque inquiétude, quelque interrogation quant à l’avenir. Voilà pourquoi, sœur Marie Flavie, voilà pourquoi mes très chères sœurs, nous voulons aujourd’hui nous tourner vers la Vierge Marie et lui demander d’intercéder pour faire grandir en nous la foi, car c’est un acte de foi qu’est invitée à faire aujourd’hui sœur Marie Flavie ; c’est un acte de foi, mes sœurs, que vous avez été invitées ce matin, après les laudes, à refaire en rénovant vos vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance ; c’est un acte de foi que vous faites mes sœurs jubilaires alors que vous rendez grâce pour la fidélité de Dieu à toute épreuve dans votre vie pour traverser toutes les épreuves, pour traverser toutes les perplexités. Et qui mieux que Marie peut intercéder auprès de son Fils pour augmenter en nous le don de la foi, elle dont la foi est précisément la béatitude, la première à toutes les autres, tant il est vrai aussi que pour emprunter ce chemin de perfection indiqué par les béatitudes évangéliques, que nous avons médité et parcouru ensemble tout au long de cette retraite, il faut la foi en Jésus. Qu’il nous obtienne la grâce de l’Esprit saint sans laquelle il n’est pas possible d’entrer sur un tel chemin de perfection qui nous conduit au Royaume des Cieux et dont vous êtes appelées à être dans le monde le signe prophétique, par votre pauvreté, par votre chasteté et par votre obéissance. « Bienheureuse celle qui a cru en l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur » s’écrie Élisabeth en disant son bonheur de voir la mère de son Seigneur venir jusqu’à elle au jour de la Visitation. La foi de Marie, qu’elle exprime dans son fiat, et qui ne fut jamais repris aux heures les plus noires et ambiguës de ce monde. Et sa béatitude, ce doit être aussi notre béatitude : Marie au pied de la croix, Stabat mater dolorosa, qui se tenait debout, douloureuse mais dans la foi alors que les promesses qui lui avaient été faites de la part de l’ange au jour de l’annonciation semblaient voler en éclats. Qu’en est-il sur la croix de celui que l’ange avait promis être appelé le Fils du Très Haut, à qui le Seigneur Dieu donnerait le trône de David son Père tel que son règne n’aurait jamais de fin et qui se réduisait à l’impuissance entre deux planches et trois clous et dans l’agonie la plus cruelle ? Mais elle était toujours dans la foi, car elle avait toujours entendu la parole qui habitait en elle. La foi qui vient de ce que l’on entend. C’est la parole de Dieu lue au jour le jour, méditée, ressassée qui fait grandir en nous la foi comme Marie qui avait entendu aussi la prophétie du vieillard Siméon au jour de la présentation de Jésus au Temple et que Saint Jean Paul II appelle comme une seconde Annonciation « et toi un glaive te transpercera l’âme ». Elle avait expérimenté cette voie de la souffrance au jour du recouvrement de son enfant à douze ans au Temple après l’avoir recherché, angoissée, pendant trois jours et trois nuits. Elle savait dans la foi que ces promesses sublimes s’accompliraient dans la souffrance et dans l’humiliation et au pied de la croix, elle croit. Elle croit en la résurrection, alors que jésus est en train d’expirer devant elle, elle croit que son règne n’aura jamais de fin. Vous aussi mes sœurs, Jésus vous a fait des promesses comme à Pierre qui s’interroge devant Jésus, qui lui dit « et nous qui avons tout quitté pour te suivre... – vous qui avez tout quitté pour suivre le Christ – ... qu’adviendra-t-il de nous ? » Et Jésus fait cette promesse qui vous fait vivre encore aujourd’hui, après 50, 60 et 70 ans de vie consacrée, au seuil d’une consécration de tout soi-même à Dieu. « Nul aura quitté maison, frères, sœurs, père, mère, champs qui ne reçoive le centuple dès maintenant au temps présent avec des persécutions et dans le monde à venir la vie éternelle. » Quelles promesses ! qui pourront pourtant parfois se heurter à quelques perplexités au cours de notre vie. Alors, demandez à la Vierge Marie d’obtenir ce don de la foi, une foi inébranlable, une foi à transporter les montagnes, et que le Seigneur fait grandir à travers sa Parole et ses sacrements. Il vous donnera des signes pour ouvrir votre cœur à ce don gratuit de la foi qui ne repose que sur Dieu se révélant à l’intime de votre cœur par la grâce de l’Esprit saint alors que le Père aspire sans cesse à rendre témoignage à son Fils au plus intime de nous-mêmes. Nous le disions hier, n’est-ce pas, nous rappelions le don de la foi qui est toujours gratuit, qui vient toujours de Dieu sans aucune cause en nous. Il faut des signes qui nous disposent à croire ; ce furent les apparitions du ressuscité, telles qu’elles sont racontées dans l’Évangile : Marie Madeleine, les disciples d’Emmaüs, la plupart des apôtres qui, pourtant, ne reconnurent Jésus qu’avec les yeux de la foi et non pas avec les yeux de la chair. St Jean, lui, a cru avant que Jésus ressuscité lui soit manifesté, il a vu seulement le tombeau vide et le Saint Linceul à sa place, il vit ce signe, et il crut. Marie, elle, n’a pas eu besoin de signe. Je veux croire qu’à l’instant "t" où Jésus, surgissant vainqueur du tombeau, est sorti de l’espace et du temps, - cette fulgurance dans laquelle il est entré définitivement dans la Gloire de son Père qui a traversé le St Linceul et qui a laissé son empreinte de Christ crucifié ressuscité, énigme insoluble pour les scientifiques d’aujourd’hui - je crois qu’à cet instant "t", la lumière de sa résurrection a touché le cœur de Marie et qu’elle a cru, et qu’elle a accueilli la présence du Ressuscité en elle. Demandons à la Vierge Marie d’intercéder auprès de son Fils pour nous donner la foi, car cette béatitude – « bienheureuse celle qui a cru en l’accomplissement de la parole qui lui fut dite de la part du Seigneur » – s’accomplit dans cette autre béatitude que Jésus proclame devant thomas l’incrédule : « heureux ceux qui croient sans avoir vu. » C’est la foi de Marie qui a cru sans avoir vu. C’est votre foi aujourd’hui, sœur Marie Flavie, c’est votre foi, mes chères sœurs jubilaires, votre action de grâces d’aujourd’hui. C’est notre foi, chers frères et sœurs, éduquée jour après jour par l’Église et par Marie. Amen